Defendor - La critique d'Excessif

Le film Defendor est sorti au Etats-Unis à la fin du mois de février. Le site internet Excessif a eu la chance de pouvoir visionner le film avant une improbable sortie en France. Voici donc leurs impressions sur le film :

Sous ses allures de Kick-Ass du cinéma indépendant, Defendor a été un peu délaissé par tout le monde. Sorti dans une seule salle à Los Angeles et déjà prévu en DVD dans quelques mois, le film a tout pour être vite oublié par la majorité. Malheureusement pour eux, ils passeront là à côté d'un métrage complètement unique et hilarant, une vraie bouffée d'air frais avec un humour très noir et une mise en scène étonnamment parfaite d'un nouveau venu que personne n'attendait, Peter Stebbings.

Defendor fonctionne parfaitement sur les deux tableaux où on l'attendait le plus : l'humour absurde qui jalonne le film du début à la fin, et une étude d'un personnage unique en son genre. Woody Harrelson porte complètement le film et apporte quelque chose de réellement intense à son Arthur, bien plus que lorsqu'il est cantonné à des seconds rôles hors-pairs (que ce soit dans Zombieland ou The Messenger). L'acteur sait parfaitement comment apporter une énorme touche de sympathie à un personnage pourtant bien barré, et il le fait sans jamais agresser le spectateur. C'est au fur et à mesure que l'on rigole des absurdités de ce Defendor que l'on prend plaisir à observer, impatient de voir quel est son prochain tour de magie. Arthur est un enfant né dans l'univers des comics et qui a grandi en pensant pouvoir sauver le monde des trafics de drogue et de ceux qui s'enrichissent en tuant des pauvres innocents. Prenant à la lettre les mots acerbes de son grand-père, il est à la recherche de Captain Industry, un méchant diabolique (et fictif) à l'origine de tous les crimes de la ville. Sous son maquillage et son casque improbable, Defendor déboule dans les rues quand le soleil tombe pour sauver les pauvres innocents des malfaiteurs. A grand coup de billes, d'abeilles dangereuses, d'une batte personnalisée et d'un énorme camion (Defendog), il récite ses dialogues avec l'intonation de Batman et s'inspire de tout ce que les super-héros disent à leurs victimes. Le voir s'embarquer dans une joute verbale avec Elias Koteas ou bien chercher l'aide du commissaire de police local est un régal absolu. Le voir s'entraîner dans sur un site en construction aussi. Tout ce qu'Arthur est capable de faire ou de créer pour entrer dans la peau de son personnage est fascinant et hilarant de bout en bout. Le plus drôle étant que toutes les actions de Defendor ruinent l'enquête secrète d'un policier, dont l'identité semble changer à chaque fois qu'Arthur attire l'attention sur lui.

Pourtant, le film ne s'enferme pas dans son côté grosse parodie avec musique triomphante et blagues acérées. Stebbings va bien plus loin dans son écriture de personnages et ne tombe pas dans la facilité. Faire d'un personnage un sympathique bonhomme qui cherche le bien de tout le monde tout en étant un peu fou (au sens littéral du terme) est dur, surtout lorsque le film ne cède pas à une énième analyse de sa quelconque maladie. Aidé par son seul ami (Michael Kelly de L'Armée des morts), il est évident qu'Arthur a été mal éduqué, abandonné par sa mère lorsqu'il était très jeune (scène d'adieu déchirante en flash-back), et souffre de quelques problèmes mentaux. Mais le film ne tente jamais de les résoudre ou même de les expliquer. La vérité est qu'il pense être un super-héros, un vrai super-héros capable d'aider les gens. Le film se construit de telle façon que l'on ne sait pas si la psychiatre assignée à Arthur (Sandra Oh) se trouve là pour le mettre en prison ou pour l'analyser réellement. La vérité réapparaît dans la dernière partie du film, où l'intrigue « passé » (Defendor contre Captain Industry) et l'intrigue « présente » (le tribunal d'Arthur pour avoir agressé un innocent) se rejoignent et finissent en beauté. Le personnage secondaire de Kat Dennings, la prostituée, prend alors tout son sens dans cette dernière partie où l'identité et les raisons de l'agression sur cet innocent prennent un sens réellement concret. Avec une notion de ce qu'est réellement la justice (et le Bien/Mal) très travaillée, Stebbings finit son film de la manière la plus idéale qui soit, réussissant à arracher quelques larmes de plus avec des scènes pourtant très simples. Là réside la plus grosse qualité du film : derrière son image de petit long-métrage sans gros budget se cache en fait une excellente reprise des thèmes du super-héros, et une réalisation d'une classe absolue.

Jamais Defendor ne fait cheap, mal fait ou même dépassé. Il s'agit là de ce genre de petit film qui vous cueille totalement par hasard, dont vous n'attendiez pas grand-chose et qui pourtant mérite bien plus que ce qui lui est réservé (un direct-to-dvd et une non-sortie en France ?). Espérons que peut-être, un bouche-à-oreille puisse aider une des plus belles surprises de ce début d'année à devenir un petit phénomène. Les échos étaient merveilleux depuis la présentation du film à Toronto, mais rien ne s'est réellement passé. Soyez-prévenus : il s'agit là d'une comédie unique, capable d'être aussi tendre que bourrée d'humour noir. Alors ne prenez pas le risque de passer à côté de ce petit bijou !


Thibault TURCAS


Lien vers l'article original : http://www.excessif.com/cinema/critique-defendor-en-direct-des-usa-5767195-760.html

Aucun commentaire

Fourni par Blogger.